Régulièrement, le tribunal met en ligne une ou plusieurs décisions particulièrement remarquables au regard de leur importance juridique ou de leur sensibilité au contexte local.
Décision du mois – Novembre 2021 – n° 1901241 – M. A
M. A a demandé au tribunal d’annuler la décision du 17 mai 2019 par laquelle le chef d’établissement support du GRETA du Limousin a prononcé à son encontre une sanction disciplinaire de licenciement sans préavis ni indemnité, ainsi que la décision du 1er juillet 2019 rejetant son recours gracieux.
Le tribunal rappelle tout d’abord qu’il appartient au juge de l’excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l’objet d’une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes. Il précise qu’en cas de pluralité de motifs fondant une décision, il lui appartient également de vérifier si l’administration aurait pris la même décision si elle n’avait pas retenu le motif erroné en fait.
En l’espèce, le tribunal indique que le grief tenant à la réalisation par le requérant, à plusieurs reprises, de « ventes irrégulières » de plats cuisinés doit être tenu pour établi dès lors que l’autorité administrative s’est fondée sur le témoignage de deux stagiaires et d’un collègue du requérant pour le retenir et que l’intéressé ne le conteste pas. En revanche, le tribunal a jugé qu’il ne peut être tenu pour suffisamment établi par les pièces du dossier que l’intéressé aurait mis en place « un système organisé » de ventes irrégulières d’objets confectionnés auprès de ses stagiaires dès lors que, d’une part, les ventes se sont déroulées sur une période limitée à 3 mois sans que leur fréquence exacte, pendant cette période, ne soit déterminée par l’administration, d’autre part, ces ventes ont été réalisées à la demande de certains des stagiaires et non à l’initiative du requérant, et, enfin, le montant global perçu par l’intéressé à la faveur de ces faits a été de l’ordre de 30 à 50 euros.
Le tribunal indique ensuite que, si ces faits, par leur nature même comme par leur caractère répété, constituent, un manquement à l’obligation de probité, d’intégrité et d’exemplarité attendu de tout agent public, notamment enseignant, dans l’exercice de ses fonctions, de nature à justifier une sanction disciplinaire, le chef d’établissement a pris à l’encontre de l’intéressé une sanction disproportionnée en prononçant une décision de licenciement sans préavis ni indemnité, laquelle constitue la sanction la plus élevée dans l’échelle des sanctions applicables à un agent contractuel de droit public. Le tribunal se fonde sur les circonstances selon lesquelles, d’une part, l’intéressé n’avait jamais fait l’objet de sanction disciplinaire avant que ne soit prononcé le licenciement en litige, d’autre part, sa manière de servir donne satisfaction, ainsi qu’en attestent son compte rendu d'entretien professionnel et le témoignage d’une dizaine de stagiaires, également, le signalement réalisé par le chef de l’établissement a été classé sans suite par le procureur, enfin, le caractère organisé des ventes de barquettes alimentaires, dont le produit final perçu par l’intéressé n’a pas dépassé 50 euros, ne peut être tenu pour établi.
Le tribunal annule ainsi, dans son dispositif, les décisions du 17 mai 2019 et du 1er juillet 2019 prononçant le licenciement à titre disciplinaire de M. A, et enjoint au GRETA du Limousin de le réintégrer dans ses effectifs à compter du 31 mai 2019 et de reconstituer sa carrière et ses droits sociaux, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.