La décision du mois: février 2023

Jurisprudence
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Régulièrement, le tribunal met en ligne une ou plusieurs décisions particulièrement remarquables au regard de leur importance juridique ou de leur sensibilité au contexte local.

Décision du mois – Février 2023 – n° 1901417

La société A. a demandé au tribunal administratif de Limoges de condamner un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à réparer le préjudice qu’elle avait subi à la suite de son éviction d’un marché de construction.

Au cas d’espèce, le règlement de la consultation avait fixé trois critères d’évaluation relatifs à la valeur technique de l’offre, à sa valeur économique et aux délais d’exécution des ouvrages, respectivement pondérés à 50%, 40% et 10%. L’application de ces critères avait conduit au classement de la candidate évincée au premier rang, avec une note totale présentant un très faible écart avec la société finalement retenue, classée deuxième.

Faisant application du principe selon lequel une méthode de sélection des offres est entachée d’irrégularité si elle conduit à ce que l’offre économiquement la plus avantageuse ne soit pas retenue, le tribunal a estimé que le choix d’attribuer le marché non à la société qui avait été classée au premier rang à l’issue de l’analyse des offres mais à la société classée deuxième, en raison du caractère moins onéreux de son offre, avait eu pour effet de neutraliser les autres critères retenus et d’éliminer l’offre économiquement la plus avantageuse. Le tribunal a en a déduit une méconnaissance des obligations de mise en concurrence.

Au vu des conditions de son éviction et de son classement au premier rang à l’issue de l’application des critères d’attribution du marché, le tribunal a estimé que la société requérante avait des chances sérieuses d’emporter ce marché et disposait donc d’un droit à être indemnisée de son manque à gagner.

Au titre de l’indemnisation du préjudice subi, le tribunal a, en premier lieu, retenu le manque à gagner subi par la société correspondant au cas d’espèce, selon l’attestation d’un expert-comptable produite au dossier, à un taux de marge avant impôt de 11%. En deuxième lieu et conformément à la jurisprudence, l’indemnisation spécifique des frais de présentation des offres n’a pas été retenue par le tribunal, en l’absence de stipulations particulières du contrat prévoyant une telle indemnisation. En troisième lieu, la juridiction a estimé que la société démontrait avoir été contrainte de présenter, en raison de son éviction irrégulière, une demande d’autorisation préalable d’activité partielle. Elle en a déduit qu’il y avait lieu de faire droit à la demande de la société tendant à la réparation du préjudice correspondant à la somme restée à sa charge à la suite de la mise en activité partielle de ses salariés.

Le tribunal a donc condamné l’établissement public de coopération intercommunal qui avait procédé à l’éviction illégale à verser à la société requérante la somme de 206 908 euros, dont il convenait de déduire, au cas d’espèce, la provision de 123 920 euros, déjà versée en application d’une ordonnance rendue en 2021 par le juge des référés du tribunal, assortie des intérêts et de leur capitalisation.